Da Parma alla Scala
OUVERTURE
1810. Toute l’Italie est en effervescence.
Niccolò Paganini, « Le diable du violon », livre une véritable prouesse de virtuosité romantique à la Scala de Milan dirigée alors par son maître et ami Alessandro Rolla. La foule est en délire !
Franz Liszt naît l’année suivante ; il dira plus tard que le jeu très virtuose de Paganini le formera dans son approche de la musique et de la représentation scénique.
1816, Il barbiere di Siviglia de Gioachino Rossini est créé à Rome.
ACTE 1
Le grand rideau rouge se lève!
Nous sommes en 1795. Niccolò Paganini, 13 ans, fait la connaissance d’Alessandro Rolla chez qui il se rend, à Parme, pour prendre des cours de violon. Il déchiffre à vue un concerto avec brio. Devant les exploits de ce jeune homme, le Maestro lui confie qu’il n’a rien à lui apprendre concernant le violon et lui propose d’étudier le contrepoint avec Gasparo Ghiretti.
A la même époque, alors qu’il se met en doigts, Alessandro Rolla s’amuse dans l’extrême aigu du violon à faire rebondir son archet sur les cordes. Entre deux gammes, un doigt de sa main gauche pince la corde de mi. Il imagine qu’on pourrait jouer avec l’archet tout en faisant des pizzicati de la main gauche. Quelques années plus tard, il fait part de ses découvertes techniques à celui qui est devenu son ami : Paganini.
Ils passent plusieurs journées ensemble à débattre de ces techniques qui deviendront des innovations instrumentales considérables dans l’histoire du violon.
ACTE 2
1813. Après un triomphe à la Scala de Milan et trois cordes en moins sur son violon, Paganini, de retour chez lui, se replonge dans la composition des 3 Duetti concertanti pour violon et violoncelle ; tout en les écrivant, il se remémore avec gaieté une scène de la Commedia dell’Arte, en particulier la guitare humoristique de Scaramuccia.
Un air d’opéra lui vient alors à l’esprit.
Il en retranscrit le thème sur son manuscrit !
Soudainement, un courant d’air, mon pauvre ami Pierrot, éteint la chandelle…
S’inspirant du changement brutal de lumière et trouvant la situation burlesque, le Maestro continue dans l’obscurité ; il rajoute alors cinq dièses à la clé ! Dans la foulée, il compose le deuxième et dernier mouvement où exulte toute l’exubérance de sa personnalité vertigineuse.
Il décide que ses 3 Duetti concertanti seront fulgurants : en deux mouvements.
ACTE 3
En 1814, Niccolò Paganini au violon et Alessandro Rolla à l’alto montent pour la première fois ensemble sur scène en duo pour une série de concerts.
Cinq ans plus tard, Paganini, encore tout exalté par la composition de ses 24 Caprices pour violon seul, s’en va découvrir la première édition de son manuscrit fraîchement sortie de l’imprimerie.
Pendant ce temps, l’idée des 3 Duetti concertanti de son ami a cheminé dans l’esprit de Rolla qui décide en 1821 d’en composer le même nombre.
De retour de la première représentation de Matilde di Shabran de Rossini, Alessandro Rolla commence à imaginer la forme générale de ses Duetti. Il y aura deux mouvements rapides dans lesquels se dessineront des guirlandes d’innovations techniques en tous genres. Il arrive chez lui, s’assoit devant son pupitre et écrit un thème vocal directement inspiré du bel canto. Il en fera un second mouvement lent.
Quelques mois plus tard, les deux amis se retrouvent sur le front de mer à Gênes. Sans s’être concertés, ils s’accordent très vite (forts de leurs expériences complémentaires de chef d’orchestre et de violon solo, principalement à la Scala de Milan), sur l’importance essentielle, dans leur inspiration, de la vie propre au monde de l’opéra, aux côtés de la technique instrumentale et de la virtuosité.
Baisser de rideau.
Michaël & Nicolas Seigle